Un chien attentif, un lapin câlin, et des adolescents en retrait qui s’autorisent peu à peu un geste, un mot, un sourire. Depuis mars 2025, au sein des unités Adolits et Adosoins, des adolescents à risque suicidaire élevé participent à des séances de médiation animale, dans un climat de confiance, de douceur et de respect. Ce projet inédit a vu le jour grâce au soutien de la Fondation Adrienne et Pierre Sommer, en partenariat avec la Fluffy Compagnie.
Créer un lien, s’autoriser à ressentir
Dans la salle d’activités, tout a été préparé. Des tapis au sol, quelques chaises autour d’une table, une nappe, un espace calme. Chaque lundi matin, pendant une heure, le même rituel s’installe : le chien entre, tout de suite accueilli par des caresses et des « Bonjour Timoune ! », des lapins et des cochons d’Inde sont installés dans des caisses ouvertes, libres de venir au contact ou de rester en retrait. Une poule picore dans un coin de la pièce. L’ambiance est posée, rassurante. Au fil des séances, d’autres compagnons font leur apparition : des furets, et deux grands chats Maine Coon prénommés Sherkan et Garfield.
Célia MASCRÉ, fondatrice de la Fluffy Compagnie, est là à chaque séance, accompagnée d’Anne DUBREUIL, infirmière de l’unité Adosoins formée à la médiation animale. Les adolescents, âgés de 11 à 17 ans, réagissent à leur manière : certains regardent sans oser bouger, d’autres vont immédiatement à la rencontre des animaux, un sourire aux lèvres. Un lapin dans les bras, un mot soufflé au chien… Des interactions naissent, à leur rythme.
« J’ai toujours été convaincue du bienfait de la présence et du contact avec les animaux. Une fois formée en médiation animale, le projet Fluffy Partage a pu se concrétiser. Durant les séances, on se pose, on prend le temps. Les jeunes découvrent à leur rythme, s’autorisent, prennent confiance en eux et en l’autre. Dans une ambiance bienveillante, de nombreux échanges ont lieu, la parole se libère.» Anne DUBREUIL.
Un projet structuré, soutenu et évalué
Le dispositif s’adresse aux adolescents à risque suicidaire élevé, âgés de 11 à 17 ans révolus, admis à ADOSOINS et ADOLITS, unités d’hospitalisation de jour et complète de crise du pole PEA du CH La Chartreuse. Il a été conçu par Anne DUBREUIL, en lien avec le Dr Mathilde CHEMELLE, médecin référent des unités concernées et cheffe de service de la filière Recherche & Innovation en santé mentale du pôle Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, et soutenu par Bérenger MASSON, cadre de santé.
Le projet comporte de plus un volet recherche, visant à évaluer de manière qualitative et prospective la satisfaction des jeunes patients ainsi que l’efficacité du programme sur différents symptômes : stress, anxiété, humeur, capacités d’autorégulation émotionnelle, idées suicidaires et pulsions autoagressives. L’évaluation reposera sur des auto-questionnaires ainsi que sur des évaluations médico-soignantes.
Le projet a été retenu par la Fondation Adrienne et Pierre Sommer dans le cadre d’un appel à projets national. Une subvention de 2 400 € a été accordée, permettant le financement de 32 séances réparties sur deux ans.
Des instants rares et précieux
Chaque cycle se compose de quatre séances, complétée d’une cinquième rencontre dédiée à l’expression créative, dont l’objectif est d’encourager les adolescents à exprimer leur ressenti sur l’expérience vécue, à travers des activités créatives.
Le programme inclut des temps de découverte, de médiation émotionnelle, de soins aux animaux et des jeux. Ce dispositif est conçu avec attention: les animaux sont suivis par des vétérinaires spécialisés et les interactions ne sont jamais forcées. Ce respect mutuel crée les conditions d’un apaisement partagé.
Les premiers retours des jeunes sont positifs. Beaucoup parlent d’un moment de calme, d’un apaisement, d’une coupure bienvenue dans leur parcours de soins. Certains attendent avec impatience la séance suivante. Ces méditations offrent l’opportunité de simplement ressentir, sans avoir à expliquer. poser une main sur un pelage doux, écouter la respiration calme du chien, observer les gestes simples des soins : autant de façons d’habiter le moment présent, de se reconnecter à soi et au monde. Face aux animaux, la relation s’invente autrement : sans enjeu, sans jugement. Et dans ce lien simple et apaisé, quelque chose se répare.
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